Les finances d’une entreprise peuvent être résumées grossièrement selon des principes budgétaires connus de tous : une colonne pour les dépenses, une autre pour les revenus. En soustrayant la première de la seconde, l’entreprise s’avère soit profitable, soit déficitaire.
Il existe par contre d’autres coûts qui viennent sournoisement nuire à l’entreprise, demeurant invisibles aux yeux d’analyses comptables.
D’où proviennent ces coûts dissimulés et comment affectent-ils les ressources financières et opérationnelles de l’entreprise ? Comment les déceler de manière efficace afin de pouvoir correctement pallier la situation ?
DÉFINIR L’INTANGIBLE
Prenons l’exemple de la création d’un département au sein d’une entreprise : un employé occupant un rôle spécifique se voit débordé par le volume de tâches qui lui est assigné, précipitant l’embauche d’assistants afin de pouvoir traiter la demande supplémentaire. L’entreprise continue de croître et les assistants se rajoutent au fur et à mesure que ces tâches s’accumulent, laissant croire aux observateurs externes que le département en question fait preuve d’une fulgurante productivité.
Par contre, tôt ou tard, toute entreprise faisant face aux réalités du marché devra revoir sa façon de faire, allant même jusqu’à devoir re-calibrer sa structure entière afin de pouvoir simplement survivre. Lorsque ce scénario survient, une cartographie des tâches et des employés s’avère souvent la meilleure solution, permettant une analyse approfondie de chaque département et l’élaboration d’un plan d’action clair.
C’est ici que les coûts dissimulés seront révélés au grand jour.
En fin de compte, tous les postes qui furent ajoutés sans planification à long terme n’ont simplement pas leur raison d’être. Une telle dissémination des tâches assure pratiquement un chaos opérationnel au sein du département, menant souvent à certaines redondances au niveau des tâches et à un flou quant aux responsabilités et aux limites de chaque poste. Pire encore, cette attitude réactionnaire empêche souvent le développement d’une réelle expertise, problème complexe qui peut s’avérer très coûteux lorsqu’on tente de le résoudre de manière précipitée.
L’entreprise ne s’est probablement jamais posé de questions quant au rôle du département dans le contexte de sa stratégie d’affaires qui doit, en théorie, guider le recrutement et la mise en place des départements. Quelle forme prendrait le département idéal d’ici cinq ans ? Est-ce que l’atteinte d’un tel but implique une refonte complète du département et des mises à pied en plus d’avoir à se procurer une expertise que l’entreprise ne possède pas en ce moment ?
Dernière chacune de ces réponses, se cachent des déboursés additionnels qui prennent soudainement un aspect très concret au sein des finances de l’entreprise, celle-ci, assumant qu’elle désire aller de l’avant, ne peut se permettre de les ignorer.
INVESTISSEMENT À LONG TERME
Les ressources en trop, celles que nous n’avons pas et toutes les tâches que l’entreprise ne peut accomplir au sein de sa structure actuelle représentent des investissements éventuels et surtout, inévitables.
Les ressources devront être acquises ou réduites, selon le cas, engendrant des coûts. Tout changement au niveau structurel représente un coût de réajustement, le retard accumulé face aux concurrents mieux aiguillés devra aussi être comblé à l’aide de stratégies d’affaires qui engendreront encore des coûts, que ce soit au niveau du marketing, de l’embauche ou d’acquisitions stratégiques.
Toute redondance représente une perte d’efficacité, facilement traduite en pertes ; l’élimination de celle-ci entraînera soit une refonte du poste avec de possibles ajustements salariaux, soit une abolition de celui-ci, pouvant mener à des mises à pied.
Bref, afin de corriger le tir, l’entreprise devra réorganiser ses effectifs, engendrant des coûts additionnels imprévus.
L’inter-connectivité des différents départements formant l’entreprise devrait, dans le meilleur des mondes, être mise à profit, assurant une répartition du travail qui est logique et qui permettra d’atteindre une efficacité optimale.
Vu de l’extérieur, un tel changement de cap sera probablement mal perçu ; lorsqu’une entreprise procède à une mise à pied de masse soudaine, les gestionnaires sont souvent blâmés et la réalité de la situation repoussée à l’arrière-plan pour laisser cours à la grogne populaire.
L’image de l’entreprise peut en être affectée de manière grave ; d’autres coûts viennent s’ajouter, que ce soit pour une campagne d’image qui devra alors être entamée afin de regagner la confiance du public ou un re-branding avec tout ce que cela implique.
Dès qu’un remaniement devra être effectué, ce sont tous ces coûts intangibles qui devront être pris en compte et calculés précisément.
L’aveuglement volontaire à cet égard trahit une réalité sous-optimale, une entreprise en rattrapage constant et risque de condamner l’entreprise à se heurter un jour ou l’autre aux bas-fonds du hasard, sans pouvoir changer de cap pour éviter ceux-ci.
PAYÉ À NE RIEN FAIRE
Dans le monde des affaires d’aujourd’hui, la sous-traitance occupe une place de plus en plus importante dont les entrepreneurs devraient se servir davantage.
Pour une entreprise qui procède régulièrement à des embauches tout au cours de l’année, se munir d’un service de ressources humaines sur place, et embaucher un directeur des ressources humaines à plein salaire et à plein temps pour le diriger, s’avère être une solution tout à fait viable. Plusieurs tâches connexes découleront d’un tel renouvellement continu du personnel, impliquant une charge de travail constante pour le service de ressources humaines, justifiant ainsi son existence et les coûts qui y sont rattachés.
À l’opposé, embaucher un directeur des ressources humaines dont la distribution des relevés de paie serait la tâche principale représente un mauvais usage de ses talents que l’entreprise pourrait mettre à profit. Non seulement s’agit-il d’un mauvais investissement, mais un véritable professionnel finira par céder à l’ennui et partira tôt ou tard à la recherche de nouveaux défis plus compatibles avec ses compétences et aspirations. Le tout sera donc à recommencer, de la mise en place du service de ressources humaines à l’embauche d’un professionnel qui correspondra cette fois-ci aux besoins réels de l’entreprise.
Si, par sa nature même, l’entreprise n’éprouve de besoins d’embauche qu’une seule fois par année, elle aurait avantage à faire affaire avec un recruteur externe. Un spécialiste en ressources humaines sur place (pas nécessairement un directeur expérimenté) ou un service de ressources humaines à distance pourra alors s’affairer aux tâches d’aspect plus administratif.
Tous ces coûts dissimulés découlent d’un travail mal fait en amont ; la planification de la structure même d’une entreprise ne peut être effectuée de manière réactionnaire sans quoi tous les pires scénarios imaginables deviendront trop rapidement concrets, représentant de réelles dépenses.
Il est bon de rappeler que bien que les meilleurs plans peuvent échouer lorsqu’arrivés à l’étape d’exécution, lorsque l’entreprise est fondée sur des bases solides, la réponse à un tel échec sera plus rapide, plus précise, plus ciblée : un simple redressement et non une réingénierie exhaustive.
Certes, certaines dépenses seront nécessaires afin de corriger le tir, mais infiniment moins coûteuses qu’une refonte complète. De plus, un remaniement de fond en comble risque de compromettre l’image publique de l’entreprise, les mises à pied de masse ayant souvent mauvaise presse.
Connaissant l’existence et les répercussions possibles de tels coûts, l’entreprise ainsi éclairée pourra placer un pied devant l’autre sur le chemin du succès ; mieux vaut prévenir que guérir.